Zacharie ou la fidelité personalisée

De mon enfance, j'ai très peu de souvenirs. J'ai été à l'élevage. J'en suis sûr. Mais ce que j'y ai vécu et les gens que j'ai rencontré... cela reste flou. Il y a bien un prénom ou l'autre qui me reste en tête mais les visages et ce que j'ai fait... C'est comme le néant ou un gouffre sans fond. Je me souviens un peu plus de mon adolescence. Heureusement, puisqu'elle est plus récente et date d'y il seulement une dizaine d'année. En soit, il n'y a rien de passionnant à raconter, vous savez. J'avais quitté le centre comme tout un chacun. Je n'avais jamais vraiment posé problème et, une fois mis en vente, je fus rapidement acheté.

Ma maîtresse s'appelait Alexane. Elle était plus âgée que moi, pas si laide mais je trouvais qu'elle se maquillait de trop. Elle était gentille avec moi, vraiment. J'avais l'impression d'avoir une mère. Mais cela me faisait vraiment étrange. Je n'avais jamais pensé que serait traité comme une sorte d'enfant. Enfin, en rue, ce n'était pas tout à fait pareil. Elle prenait soin des apparences et elle me traitait alors plus froidement. Tout ce passa bien pendant 4 ans. Car un jour, elle rencontra un homme, en tomba éperdument amoureuse et se fiança avec lui. Ils se marièrent et j'avais eu la tâche de les aider dans les préparatifs, ce qui est logique. Mais par après, l'homme fut jaloux et me traita assez mal, d'une façon que je connaissais peu puisque ma maîtresse-chérie avait toujours été douce. Cela avait commencé avec des regards noirs, des insultes de passage, l'un ou l'autre coup. Puis il fit une scène à sa jeune épouse pour qu'elle m'abandonne. Il ne voulait pas d'hybride mâle chez lui. Et Alexane se sépara alors de moi. Après tout, je n'étais qu'une chose facilement remplaçable.
Je n'avais pas compris pourquoi l'homme avait agi de la sorte. Maintenant, cela me parait plus clair mais je trouve quand même qu'il avait exagéré. Jamais je n'aurais pu tomber amoureux de ma maîtresse. Ce n'était pas ce genre de sentiment que j'avais eu pour elle.

Je me retrouvais alors à nouveau en vente à mes 20 ans. Ce fut un couple avec deux enfants qui m’accueillit chez eux. Là encore, tout ce passa bien au début. Je devais garder les enfants quand les parents travaillaient, aller les chercher à l'école et les aider à faire leur devoir. Mais un jour, l’aîné des deux enfants commença à voler de l'argent à ses parents. Ceux-ci ne pouvaient imaginer que c'était l'un de leurs enfants et m'accusèrent. Je leur répétais pourtant que ce n'était pas moi et que j'étais innocent, que jamais je ne ferais ça et je n'en avais même pas la nécessité mais ils m'abandonnèrent à leur tour. J'avais été blessé. Bien plus que lors de mon premier retour à la boutique. J'avais l'impression que jamais je ne serais repris par quelqu'un, que tout le monde savais pourquoi on me rendait au magasin. Et pourtant...

A mes 22 ans, un homme, Mario, me prit sous son aile. Il était policier et voulait d'un hybride comme aide et soutien. Mais avant, il avait fallu que je subisse un entraînement spécial. Après cela, dans un premier temps, je restais au bureau et m'occupais de tout ce qui était paperasse. Après une bonne année, j'avais tenté d'en parler avec mon maître. Je voulais voir l'extérieur. Et après quelques négociations, je pus partir en patrouille avec lui. Lui, il ne s'est jamais plaint de moi. C'est grâce à lui que j'avais repris de cette confiance qui m'avait fuit lors des précédents abandons. Car même si je n'avais rien fait paraître, j'avais pensé être fautif, d'une façon où d'une autre.

Et à nouveau, des changements survinrent. L'été 2050, avec les « attentats » hybrides, nous avions eu le sentiment d'avoir été inutile puisque nous n'avions rien pu faire contre, juste apparaître par après et calmer la foule. Malgré tout, je reçu une sorte de promotion. J'avais été muté à la Brigade, nouvellement créer. En revanche, ce ne fut pas le cas de Mario. Il fut alors de mauvaise humeur pendant une semaine, une humeur de chien, si vous me permettez l'expression ! Et ensuite il me lâcha. Comme les autres. Sa jalousie d'homme, son amour propre d'être humain supérieur l'avait mal pris. Et suite à cela, il n'avait rien trouvé de mieux que de m'abandonner à son tour.
Et pourtant, j'avais toujours ce sentiment positif envers les humains. Je voulais toujours leur être fidèle même si eux ne l'étaient pas avec moi.

C'est ainsi qu'à 26 ans, je me retrouve dans la Brigade, vivant dans la caserne.

   

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